Item 241 - Goitre, nodules thyroïdiens et cancers thyroïdiens

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Résumé

Objectifs CNCI
  • Diagnostic des goitres et nodules thyroïdiens
  • Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient.
Recommandations
  • Référentiel d'Endocrinologie 2019
  • Cancer de la thyroïde : HAS 2012
Mots-clésA savoir
  • Signes de malignité d’un nodule
  • Signes de compression cervicaux
  • TDM cervico-thoracique
  • Risque principal = récidive
  • Pluridisciplinaire / RCP / PPS
  • Thyroïdectomie totale systématique
  • Totalisation isotopique à l’iode 131
  • Surveillance par thyroglobuline
  • Diarrhée motrice + flush = CMT
  • Recherche mutation du gène RET
  • Cytoponction si nodule > 1 cm
  • Schéma daté de la thyroïde
  • Bilan d’extension clinique
  • La cytoponction n’élimine pas
  • Pas d’iode au TDM
  • Ex. anapath. peropératoire
  • Hormonothérapie au décours
  • CMT: dépistage phéo. préop
  • Génétique = consentement
  • Prise médicamenteuse/goître
  • Evoquer malignité si nodule
  • Chirurgie si nodule > 3 cm

 

A. GOÎTRE ET NODULE THYROÏDIEN

CAT devant un goître thyroïdien

Généralités

  • Définition:
    • goître = hypertrophie globale de la thyroïde
    • Tuméfaction cervicale antérieure ascendante à la déglutition
  • Prévalence = 10% de la population qui augmente avec l'âge et à prédominance féminine (ratio 3:1)
  • Définition échographique : goître si > 18 mL (F) ou > 20mL (H) (et 16mL chez l’adolescent)
  • Histoire naturelle : goitre diffus → multinodulaire →GMNT → compressif
  • 4 questions en cas de goitre:
    • Congénitaux ou acquis
    • Diffus ou localisé
    • Normo, hypo, hyperfonctionnel
    • Bénin ou malin

Etiologies

  • Goître avec hyperthyroïdie
    • Maladie de Basedow
    • Goître Multi-Hétéro Nodulaire Toxique (GMHNT)
    • Hyperthyroïdie iatrogène ou surcharge iodée
    • Thyroïdite subaiguë de De Quervain
  • Goître avec hypothyroïdie
    • Thyroïdite d’Hashimoto
    • Carence en iode
    • Thyroïdite du post-partum
    • Hypothyroïdie iatrogène
    • Hypothyroïdie congénitale
  • Goître avec euthyroïdie = goître simple (idiopathique)
    • Initialement goitre diffus et homogène puis avec le temps apparition de nodules possible
    • C'est seulement au stade de goître plurinodulaire qu'apparait le risque de complications (gène cervicale)
    • Facteurs favorisants:
      • Nutritionelscarence iodée ( augmente la sensibilité du parenchyme thyroïdien à l'effet trophique de la TSH)
      • Génétiques: goîtres sporadiques (≠ endémique): familiaux ++
      • Hormonaux: poussées évolutives à la puberté / lors des grossesses (présence de récepteurs aux oestrogènes sur les cellules vésiculaires)
      • Tabac (contient des thiocyanates)
      • Médicaments: Lithium (se comporte comme un ATS)

Orientation diagnostique

  • Examen clinique
    • 5 questions à se poser: 
      • douloureux ?
      • compressif ?
      • dysthyroïdien ?
      • liée à une cause sous-jacente ?
      • nodulaire ?
    • si tout est négatif : goitre simple
    • Interrogatoire
      • Origine géographique / évaluer l’apport alimentaire en iode
      • Prise médicamenteuse / surcharge iodée (Amiodarone ++)
      • Signes fonctionnels
        • Gène fonctionnelle
        • Syndrome thyréotoxique
        • Syndrome d’insuffisance thyroïdienne
        • Signes de compression médiastinale +++
    • Examen physique
      • Local = goître (schéma daté: à savoir)
        • Basedow = diffus / homogène / indolore / non compressif / mobile / thrill
        • Hashimoto = irrégulier / hétérogène / +/- volumineux / ligneux
        • Carence iodéeancien et homogène +/- remaniements nodulaires
        • Thyroïdite de De Quervain = ferme et douloureux
        • Thyroïdite du post-partum = petit / ferme / sans thrill / homogène
      • Régional = rechercher des signes de compression +++
        • douleur
        • dyspnée (compression trachéale)
        • dysphagie (compression oesophagienne)
        • dysphonie (nerf récurrent)
        • Autre : syndrome cave supérieur (compression veineuse profonde)
          • manoeuvre de Pemberton : bras levés collés contre les oreilles qui donne un aspect cramoisi du visage
  • Examens complémentaires
    • Bilan thyroïdien biologique
      • Systématiquement: TSH
      • Si TSH anormale => T4L pour évaluer l'importance de la dysfonction hormonale
      • Si TSH augmentée: AC anti TPO (et AC anti TG si AC anti TPO négatifs)
      • Si TSH basse: TRAK (AC anti Récepteurs de la TSH stimulants)
      • Si TSH ↓ +/- TRAK positifs = hyperthyroïdie → faire scintigraphie
      • Si TSH ↑ +/- anti-TPO positifs = hypothyroidie → scintigraphie inutile
      • !! la thyroglobuline est SANS intérêt sauf pour la surveillance des CMT opérés
    • Echographie thyroïdienne
      • Systématique quelque soit la TSH et le bilan immunologique
      • Caractérise le goître (volume, vascularisation, guide la cytoponction) / recherche des nodules associés
      • Thyroïde normale : ISOéchogène
    • Scintigraphie thyroïdienne
      • SI TSH basse / inutile si hypothyroïdie
    • Radio de thorax de face et de profil:
      • indiquée si 
        • goitre plongeant
        • signes de compression
    • TDM ou IRM cervico-thoracique
      • Dans le cadre d'un bilan pré-opératoire

Point sur le goitre simple

  • Généralités
    • Définition: Hypertrophie corps thyroïde indolore, non compressive, sans dysthyroïdie, sans étiologie sous-jacente, sans nodule associé. 
    • Epidémiologie : prédominance féminine à partir de la puberté. 
  • Facteurs favorisants : 
    • Facteurs génétiques : Troubles de l’hormonosynthèse
    • Sexe féminin : œstrogène (recepteurs sur vésicules thyroïdiennes) + grossesse (↑ besoin iodé)
    • Carence iodée : compense par ↑ sensibilité TSH + production de facteur de croissance thyr
    • Tabac +++ : via le thiocyanate
    • Certains aliments : (choux rutabaga, manioc) contiennent des thiocyanates
    • Certains médicaments : lithium, OP’DDD (mitonate), amiodarone
  • Examen clinique : 
    • Terrain : F>H / lors d’épisodes de la vie génitale : puberté, grossesse (Rôle oestroG)
    • Clinique /Paraclinique
      • Pas d’hyper-hypothyroïdie
      • Examens complémentaires normaux 
      • Echo et/ou scinti 
  • Evolutions/complications : 
    • Evolutions : 
      • Goitre homogène (ado, puis remaniements progressifs lors de grossesse / stress)
        • TSH ↑ : hashimoto / TSH ↓ : basedow (mais en général TSH N)
      • Goitre paucinodulaire puis multinodulaire asymptomatique (adulte)
        • TSH + ponction si doute sur nodules suspects / scinti
        • Rechercher le caractère plongeant (bord inférieur non palpable)
      • Goitre multinodulaire symptomatique (complications) :
        • Hémorragie : hématocèle
        • Infection : strumite
        • Hyperthyroïdie
        • Compression
        • Cancérisation

Moyens thérapeutiques

  • Petits goîtres simples chez les adolescents : éradication médicamenteuse (car font le lit des goîtres multinodulaires de l'adulte)
    • => Levothyroxine 1-1,5µg/kg/j pendant plusieurs mois (juqu'à normalisation du volume thyroïdien)
    • Le traitement peut être repris en cas de nouvelle poussée évolutive ou en cas de grossesse.
    • Le traitement peut être maintenu en l'absence d'obtention d'un volume thyroïdien normal dans les familles à risque
  • Chez l'adulte et le sujet agé: goîtres multinodulaires euthyroïdiens et non suspects
    • => Surveillance (ttt médicaux peu efficaces et parfois mal tolérés)
    • La chirurgie est une option mais non dénuée de risque (atteinte récurentielle ou parathyroïdienne), avec un risque de gène esthétique liée à la cicatrice
  • Goître Symptomatique (gène déglutition, phonation, gène esthétique, circulation collatérale, TSH basse)
    • => Thyroïdectomie totale
  • Goître nodulaire Suspect de malignité
    • => Thyroïdectomie totale
  • Pour les goîtres anciens, négligés, chez des patients agés difficilement opérable:
    • Iode 131 (IRA-thérapie) peut être envisagée
    • objectif = diminution du volume du goître, des signes compressifs, voire réduction d'une hyperthyroïdie.

CAT devant un nodule thyroïdien

Généralités

  • Définition: nodule = hypertrophie localisée et anormale de la glande thyroïde
  • Fréquent ++ (4% de la population) avec prédominance chez la femme (ratio 3:1) / incidentalome ++
  • !! Principe de la prise en charge
    • Dépister le maximum de cancer en opérant le minimum de nodules bénins tout en évitant le surdiagnostic et les échographies systématiques

Etiologies

  • Tumeurs thyroïdiennes
    • bénignes: adénomes vésiculaires / kystes simples et hémorragiques / nodules dans le cadre de thyroïdite
    • malignes (environ 5%): cancers paillaires / vésiculaires / médullaires / anaplasique / lymphomes / métastases
  • !! NPO devant un nodule cervical: causes extra-thyroïdiennes
    • adénopathie cervicale / métastase d’un cancer solide
    • kyste du tractus thyréoglosse / adénome parathyroïdien

Orientation diagnostique

  • Examen clinique
    • Interrogatoire
      • FdR de nodules = âge / femme / surcharge pondérale / carence iodée
      • FdR de cancer =  homme / âge extrême / irradiation cervicale 
      • En faveur d’un CMT: flush / diarrhée motrice / atcd de NEM2
      • Prise médicamenteuse / carence iodée (origine géographique)
    • Examen physique
      • Affirmer le siège thyroïdien: mobile à la déglutition +++
      • Rechercher des signes de malignité (à savoir)
        • locaux: nodule dur / pierreux / adhérent / fixe / évolutif (!! schéma)
        • régionaux: ADP régionales / signes de compression cervicale (« 4D »)
        • à distance: signes d’appels pour une métastase (douleurs osseuses, etc)
      • Rechercher une dysthyroïdie
        • Signes de thyréotoxicose ou d’insuffisance thyroïdienne
      • Elements en faveur d'une étiologie
        • hématocèle : apparition brutale d'un nodule douloureux
        • thyroïdite subaigë : nodule douloureux + fièvre
        • cancer : nodule compressif + ADP
        • nodule toxique : nodule + hyperthyroidie
        • thyroïdite d'hashimoto : nodule + hypothyroidie
  • Examens complémentaires
    • Bilan de 1ère intention
      • Dosage de la TSH: systématique devant tout nodule
        • TSH ↓ = adénome toxique → scintigraphie et doser T3L et T4L
        • TSH ↑ = hypothyroïdie → échographie + T4L et AC anti-TPO (scintigraphie inutile)
        • TSH N = suspicion de cancer: échographie + cytoponction + calcitonine
      • Echographie thyroïdienne
        • caractérise le nodule (localisation / volume / échostructure / échogénicité etc) / recherche ADP / explore structures adjacentes
        • réalisation d'un schéma de repérage ++
        • Score de risque échographique = EU-TIRADS 2017
        • Critères échographiques de malignité ++
          • Hypoéchogène
          • Limites/bords imprécis
          • Forme non ovale
          • Micro-calcifications
    • Cytoponction à l’aiguille fine
      • Indications
        • contexte à risque
          • ATCD de RT dans l'enfance
          • Histoire familiale de CMT ou NEM2
          • Taux de calcitotine élevé à 2 reprises
          • ADP suspecte associée
          • Nodule associé à une métastase
        • nodule à risque
          • cliniquement : dur / compressif / augmentation de volume rapide
          • 2 critères échographiques de malignité (cf supra)
          • hyperfixation au PET-TDM
          • cytologie initiale : non contributive / lésion vésiculaire de signification indeterminée
        • goitre multinodulaire : cytoponction si nodule dominant > 2 cm (sauf si kystique pur) / contexte ou nodule à risque (cf supra)
      • Résultats: 4 possibilités (classification de BETHESDA)
        • Bénin  → contrôle à 6-12M facultatif ou si apparition de critères suspects
        • Prélévement non satisfaisant ou Indéterminé  → 2ème cytoponction à 3-6 mois si solide / 6-18 mois si mixte
        • Suspect - Malin  → geste chirurgical
    • Autres selon les cas
      • Scintigraphie: indications si TSH normales  
        • Cytologie ininterprétable à 2 reprises (Bethesda 1)
        • Cytologie indeterminée (Bethesda 3 ou 4)
        • CI à la ponction (tb hémostase, traitement AC)
      • Dosage de la calcitonine (seuil = 150pg/mL): 
        • si cas familiaux ou signes cliniques de CMT
        • si nodule suspect de malignité
        • avant TOUTE chirurgie

CAT thérapeutique +++

  • Pas de chirurgie = surveillance clinique + échographie  + TSH
    • Surveillance à 6-18 M puis à 2 / 5 et 10 ans
    • Objectifs
      • dépister les faux-négatifs secondairement
      • recherche dysthyroïdie
      • recherche gêne fonctionnelle
    • Cytologie ssi
      • signes cliniques de suspicion
      • augmentation de la taille de plus de 20 %
      • nodule non liquidien
      • modification des données échographiques
  • Indication chirurgicale
    • Nodule malin ou suspect de malignité d'emblée ou secondairement
    • Augmentation franche de la calcitonine sérique
    • Nodule volumineux compressif
  • Traitement Hormonal freinateur
    • Prévient l'augmentation de la taille du nodule et de la dystrophie périnodulaire.
    • Indiqué en cas de nodule bénin dans les familles où se constituent des goîtres plurinodulaires
    • A éviter chez les plus de 50 ans, et maintenir une TSH proche de la limite inférieure de la normale en cas d'utilisation après cet age.

Situations particulières

  • Formations kystiques
    • Les kystes et hématocèles purs: Formations anéchogènes
    • Ponction évacuatrice possible voire hormonothérapie freinatrice ou alcoolisation en cas de récidive
    • Les formations mixtes à contenu liquide jusifient un dosage de la T4 et de la PTH dans le liquide de ponction ( nature thyroïdienne ou parathyroïdienne de la formation) et ponction pour étude cytologique de la portion charnue
  • Nodules Thyroïdiens et grossesse
    • En cas de nodule suspect ( clinique / écho / Cyto): la chirurgie peut être faite au 2e trimestre ou après l'accouchement
  • Nodule occulte
    • Généralement < 1cm, non palpables. Parfois plus volumineux mais méconnus (situation postérieure / palpation cervicale difficile)
    • Découverts fortuitement par: Doppler carotidien / Echo parathyroïdienne / TDM cervicale ou thoracique / TEP.
    • La proportion de nodules occultes correspondant à un cancer est également proche de 5%, (majorité de microcancers papillaires peru agressifs)
    • Incitent à la prudence les signes suivants:
      • Adénopathie cervicale, paralysie récurrentielle
      • hérédité de CMT (30% de formes familiales)
      • hérédité de cancer papillaire (5% de formes familiales)
      • Signes écho: Hypoéchogène, hypervascularisé, contours irréguliers, micro-calcifications (TI-RAD 4b, 5)
      • La découverte par une fixation en TEP
    • Ponction cytologique à l'aiguille fine sous contrôle écho:
      • réservé aux formations nodulaires solides hypoéchogènes > 8-10 mm
    • La très grande majorité des nodules occultes peuvent bénéficier de la simple surveillance clinique ( palpation)
    • Plus rarement une chirurgie ou une surveillance échographique ou cytologique sera envisagée 

Synthèse : arguments de malignité devant un nodule isolé de la thyroïde

  • Cliniques
    • Terrain: sexe M / âge extrêmes / atcd d’irradiation cervicale / atcd familiaux (NEM2)
    • Signes locaux = > 3cm / dur / ovalaire (large > haut) / irrégulier
    • Signes régionaux = ADP cervicales + signes de compression (4D)
    • Signes généraux = signes de métastases / diarrhées motrices et flushes
  • Paracliniques
    • Echographie: tissulaire / hypoéchogène / vascularisé / contour irrégulier / μ-calcifications / ADP / halo incomplet
    • Cytoponction: abondance cellulaire / anomalies cytonucléaires / inclusions nucléaires
    • Scintigraphie: hypofixation = nodule froid
    • TDM cervico-thoracique: ADP +/- métastase
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